Désobéir de F. Gros
Chapitre 14 : L’humanité
nous décale
Le chapitre 13 se déterminait par
la phrase suivante : « C’est toujours maintenant pour choisir, et le
passé pèse peu au regard de cette puissance ». Ici, ce chapitre se
présente comme étant la continuité du chapitre précédent comme le montre la première
phrase : « Ce maintenant de la pensée c’est la possibilité continue
de désobéir à soi-même ».
Dans ce chapitre, l’auteur
cherche à répondre à la problématique suivante : la possibilité de
désobéir est-elle une traîtrise ? Pour répondre à cette question, Frédéric
Gros avance que la force de désobéir à l’autre, il la trouve dans sa capacité
à pouvoir obéir à lui-même et donc à pouvoir se commander d’obéir uniquement à lui-même
et par là de désobéir à la société l’entourant en s’obéissant.
Le soi en tant qu’être souverain
et dur est un mythe et l’homme n’existe pas dans ce cas là en tant que
personne. De plus, le soi indélégable qui fait que l’homme peut désobéir n’est pas
un refuge de souveraineté.
Cette idée de rapport à soi-même
est appuyée par La Boétie dans Le
discours sur la servitude volontaire
où l’homme est désigné comme étant le « traître de lui-même ». Par
cette expression, Frédéric Gros entend le fait que la liberté est crainte par
l’homme car elle le met dans une situation d’obligation qui peut faire qu’il se
désobéit à lui-même, à ses propres valeurs.
Socrate quant à lui présente la
désobéissance éthique qui fait que l’homme se rebelle et se révolte contre la
société afin de ne pas devenir le traître de lui-même et de rester fidèle à ses
propres valeurs. La pensée introduit donc un décalage entre le soi intérieur et
extérieur.
Fréderic Gros présente aussi au
travers de Socrate dans la République,
le soi du décalage comme le montre la dissonance existante entre « le deux
en un » c’est-à-dire la pensée et le soi prenant conscience de lui-même à
travers l’aide qu’il peut apporter aux autres.
Ce soi indélégable est le pari
qui cherche à être démontré depuis Socrate jusqu’à Foucault. Ce pari repose sur
l’espérance de l’existence d’un soi indélégable. Ce que les hommes recherchent
réellement est une vérité acquise grâce à une pensée individuelle et réfléchie.
Mais cette quête de vérité par la propre pensée de l’être implique un souci de
soi-même.
Frédéric Gros afin d’illustrer
cette idée met en avant la question socratique « est-ce que tu sais
seulement jusqu’à quel point tu ne sais pas ce que tu sais ? ». La
question que l’Homme doit se poser : « Suis-je sûr de bien penser ce
que je pense » c’est-à-dire suis-je sûr que cette pensée est bien la
mienne et qu’elle n’est pas dictée par la société qui m’entoure. Pour cela
c’est à moi de décider ce que je vais faire de cette pensée, comment je vais la
mettre en œuvre quitte à désobéir à la pensée commune dictée par la société. Et
c’est par cette mise en œuvre de ma pensée que je deviendrai seul responsable
de mes actes et des conséquences de ces derniers. Frédéric Gros clôt son
ouvrage et cet ultime chapitre par l’idée selon laquelle l’ensemble de ces sois
indélégables et uniques forment une alliance et « tiennent l’urgence et
l’honneur éternels, intempestifs, de la vraie politique, celle des désobéissances ». Chloé TL