Désobéir, Frédéric Gros, Chapitre 9 : "La promenade de Thoreau"


Désobéir de Frédéric Gros



Chapitre 9 : La promenade de Thoreau



Le titre du chapitre 9 fait référence au livre « Une promenade en hiver » de Henry David Thoreau qui fut un poète ainsi qu’un philosophe naturaliste et écologiste américain du 19e siècle. Dans cet ouvrage, Thoreau prône le retour à une vie naturelle, c'est-à-dire pour lui, l’initiation à la vraie vie, loin des lois sociétales. Il est considéré comme le fondateur du concept de « désobéissance civile », lorsqu’il fut jeté en prison pour avoir refusé de payer une taxe visant à soutenir la guerre contre le Mexique et ce à un état qui pratique l’esclavage. Pour lui, la désobéissance civile c’est le refus de se soumettre à une loi injuste.

F. Gros reprend son propos, le commente et l’étoffe après un rapide commentaire sur son vécu.

Dans le sillage de H. Arendt et de Rawls, F. Gros se propose de requalifier l’acte de Thoreau ainsi) :

L’action de Thoreau n’est pas un acte de désobéissance civile car la désobéissance civile se met en place via un groupe structuré qui a un objectif politique précis visant la justice.

Or, ici Thoreau n’a fait preuve que de dissidence. En effet, c’est un individu isolé qui a refusé une loi qu’il jugea injuste.

« La désobéissance civile suppose au contraire un désobéir ensemble » car on y trouve toujours cette idée de « faire société » et du « vivre ensemble ».

Ainsi, la désobéissance civile a pour but d’alerter l’opinion publique, s’adressant à la conscience de tous voir même au sentiment universel de justice. Elle cherche à dénoncer et à soulever le reste des citoyens pour davantage de justice.

De plus, au contraire du geste Thoreau, un mouvement de désobéissance civile accepte par avance la sanction et s’y prépare.

Par son intervention, Thoreau soulève la question suivante : le légal est-il juste ?

En se faisant son porte-parole, F. Gros dénonce le fait que la philosophie existe aujourd’hui en tant que discipline et savoir mais plus en tant que philosophie de vie, amenant à des actes véritables.

Ainsi il ne sert à rien d’accumuler tout ce savoir si on ne philosophe pas et que l’on n’agit pas (en désobéissant !).

F.Gros va alors opposer Kant et Thoreau :

Pour Kant, dans Qu’est-ce que Les Lumières ? la vraie désobéissance est dans la critique (théorique),pour Thoreau la vraie critique est dans la désobéissance (pratique).

L’auteur reprend donc à nouveau la pensée de Thoreau qui défend l’individualité et la conscience de chacun face aux lois de l’Etat.

Sa thèse est la suivante : La priorité n’est pas l’obéissance aux lois mais la préservation de ses propres principes. Chacun doit se laisser guider par sa conscience et ne pas obéir aveuglément aux lois en toute passivité. ».

Pour Thoreau, la désobéissance est un devoir de nature spirituelle car il doit rester fidèle à lui-même.

Ainsi, le vivre ensemble de la démocratie n’en serait pas perturbé car s’y plier sans désobéir équivoquerait à se plier à la loi du plus fort.

Dans son texte il est alors question du salut de sa propre conscience, dont se seraient inspirés notamment Tolstoï, Ghandi et Martin Luther King pour la dimension spirituelle que la désobéissance civile de Thoreau apporte.

Thoreau prône un anticonformisme au service des autres en faisant l’apologie de la désobéissance active face à la désobéissance passive.

F. Gros conclut son chapitre sur une citation de Thoreau :

« Si je ne suis pas moi qui le sera à ma place ? »

Citation qu’il complète pour la faire échapper à l’égoïsme par celle de Hazaken un rabbin d’Israël du 10e siècle après JC :

« Si je ne suis pas pour moi, qui le sera ? SI je ne suis que pour moi que suis-je ? Et si pas maintenant, quand ? ».